Défilé Céline - Automne/hiver 2015-2016
Entre rock industriel et musique brésilienne, Phoebe Philo souffle le chaud et le froid sur une collection automne/hiver où glamour et grammaire conceptuelle tentent de fusionner pour le meilleur...
Les inspirations
Phoebe Philo s'attaque cette saison aux notions de glamour et de "sexyness". Deux concepts que la créatrice avait jusqu'ici soigneusement évité, mais auxquels elle décide aujourd'hui de se frotter afin de tenter d'y apporter une définition "célinienne".
La femme Céline
Radicalement cérébrale, la femme Céline tente d'injecter un peu de fantaisie et de sensualité à sa garde-robe. Peu coutumière du fait, elle commet quelques maladresses, dont le premier degré naïf se révèle plutôt touchant. Elle finira cependant par faire une pause salutaire dans son questionnement quasi métaphysique en revêtant des atours au minimalisme rassurant.
La collection
Le vestiaire de Phoebe Philo alterne cette saison entre toilettes au glamour intello et looks permettant à la femme Céline de garder les pieds sur terre. C'est ainsi que les manches des pulls côtelés se terminent façon renaissance, que les robes empruntent à la lingerie satin et découpes soutien-gorge, que les manteaux se parent d'opulente fausse fourrure, que les étoffes rapiécées laissent entrevoir la peau nue et que les redingotes édredons se déboutonnent sur les épaules. Dans le même temps, les robes pulls épousent chastement le corps, tandis que les capes et autres combinaisons pantalons floutent la silhouette.
Or, parmi ces diverses toilettes au discours fort et peu nuancé se glissent parfois des modèles réussissant subtilement la synthèse des deux univers. On pense notamment à la robe gainée d'une ébauche de corset conceptuel, aux manteaux stricts à l'imprimé zébré suave, aux amples jupes en cuir sensuel, aux trenchs en cuir souple à la tournure féminine et aux volumes puritains, mais aussi et surtout aux chemises aux imprimés naïfs et aux nonchalantes manches fendues.
Les points forts
Les graphismes animaliers empruntés à des livres pour enfants offrent à la collection une agréable fraîcheur espiègle. De leur côté, les manteaux zébrés, les robes et jupes en cuir souple, les dos nus ainsi que les redingotes rétro/minimalistes de divas hollywoodiennes devraient séduire tant les acheteurs que les clientes Céline.
Le dress code
Cette saison, le mot d'ordre est "long sur long". Les chemises se portent ainsi dégoulinant sur les jupes longueur midi, la longueur des manteaux flirte avec celle des jupes qu'ils recouvrent, tandis que les longs pulls étroits descendent sur de larges pantalons.
Les accessoires
Phoebe Philo se lance dans le contenant pour gadgets high-tech en n'imaginant rien de moins qu'un holster pour guerrière urbaine ayant troqué son magnum contre un téléphone.
Les chaussures
La créatrice britannique offre sa contribution à la tendance "baskets immaculées" en livrant une tennis slip-on aux allures de chaussure orthopédique du futur. Entre décolleté cheville sensuel et bout carré masculin, les ankle souliers en cuir tressé (parfois bijouté) se révèlent quant à eux bien plus intéressants.
Ce que j'en pense
Pour cette collection, Phoebe Philo s'est demandée "comment le glamour pouvait fonctionner dans la vie de tous les jours, tout en restant authentique". La réponse se révèle "Célinienne", à savoir peu évidente à première vue.
En voulant rationaliser cette notion (que Wikipedia résume ainsi : "Charme envoûtant, séduction qu'une actrice de cinéma ou une jolie femme exerce par son attitude sensuelle et sa tenue vestimentaire suggestive"), Philo nous livre en effet des toilettes aux détails volontairement maladroits. Cherchant à exprimer une nouvelle séduction à la Yohji Yamamoto, elle s'amuse ainsi à dépenailler ses mannequins. Le résultat s'avère malheureusement souvent artificiel et proche de l'exercice de style, à l'instar de la peu convaincante étole à pompons de fourrure ou encore des manteaux en soie Georgette. Ce n'est finalement que lorsqu'elle s'autorise à lâcher prise et à s'affranchir de cette obligation tacite de livrer du look intello que la créatrice parvient à convaincre. Mise entre les mains d'une femme plus adepte des Stan Smith que des froufrous, la notion de glamour devient alors un alliage subtil entre sophistication, insolence, confort sensuel et rigueur déjouée...
Par Lise Huret, le 10 mars 2015
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