Chronique #51 : Le paradoxe du complexe
Lorsqu'ils sont liés au physique, les complexes sont souvent prétextes à maints stratagèmes visant à dissimuler l'objet de notre désamour, l'idée étant de cacher à tout prix les parties de notre corps que l'on ne juge "pas montrables", "trop comme ceci" ou "pas assez comme cela"...
J'ai longtemps été très complexée, persuadée d'avoir un double menton, une culotte de cheval et des jambes "poteaux". Pendant des années, je portais ainsi hiver comme été d'immenses foulards enroulés autour du cou, je ne sortais jamais sans nouer un pull autour de ma taille, je ne m'autorisais à la plage que le maillot de bain shorty, je ne quittais jamais mes talons et je ne portais que des boots ou des bottines montant suffisamment haut pour dissimuler le bas de ma cheville.Et si j'ai toujours trouvé cette gymnastique contraignante, je mis longtemps à réaliser à quel point elle était contre-productive. Ce n'est que lorsque Julien commença à me faire remarquer le ridicule de certaines situations - comme le port d'une écharpe en plein mois de juillet… - que je me mis à regarder la réalité en face.
Alors qu'elles étaient sensées atténuer mes complexes, mes différentes manies vestimentaires faisaient en réalité pire que mieux :
En portant des foulards, je cachais mon long cou et tassais mon visage.
En nouant un pull autour de mes fesses, je parasitais mon look.
En me glissant au sein d'un maillot de bain shorty, je cassais la ligne de la cuisse et tassais ma jambe (alors qu'un slip de bain noué sur le côté aurait allongé cette dernière).
En ne chaussant que des bottines ou des converses montantes, je créais un effet d'optique peu flatteur donnant l'impression que ma jambe était plus épaisse et plus courte que ce qu'elle n'était en réalité (alors que des souliers dévoilant la malléole auraient été bien plus flatteurs).
Depuis, la grossesse, la maturité et l'acception de moi-même sont passées par là, et c'est avec beaucoup de tristesse que je repense à celle que je fus pendant toutes ces années, lorsque je ne considérais mon corps que comme un ensemble de défauts à dissimuler à tout prix.
Aujourd'hui, je considère chaque partie de mon corps comme légitime. Je ne me focalise plus sur tel ou tel point de ma morphologie, je m'envisage avant tout comme un ensemble. Et cela me fait un bien fou. Je marche heureuse et légère dans la rue et je sais que si je n'ai pas changé physiquement, mon allure elle a évolué. Le fait d'aimer et d'habiter son corps change tout...
Par Lise Huret, le 05 juin 2015
Suivez-nous sur , et